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9 mai 2015 6 09 /05 /mai /2015 09:26

L’ART DE VIVRE A LA FRANCAISE

Une nouvelle série de Lettres d’Information

par Marie-France LECHERBONNIER

Présidente de l’Association pour le Rayonnement

du Savoir-vivre et du Protocole

De 2012 à 2014, j’ai publié plus de cent lettres d’information sur le savoir-vivre, dont j’ai exploré la quasi totalité des aspects. Pour l’essentiel le contenu de ces lettres d’information a été repris dans mes deux ouvrages publiés par les Editions Nomad le 2013: Le savoir-vivre et Questions de Politesse.

J’entreprends aujourd’hui une Nouvelle Série de Lettres d’information. Elle sera consacrée à L’Art de vivre à la française, une thématique qui remporte actuellement un grand succès avec l’intérêt sans cesse accru des étrangers francophiles pour la civilisation française.

Ces lettres d’information mensuelles seront très fournies en documentation. Mon but est en effet de mettre à disposition de vrais dossiers sur les moeurs, les traditions, les productions qui ont illustré et qui continuent d’illustrer notre Art de vivre. La mode, les arts de la table, la gastronomie, la civilité…

Le premier dossier est dédié à la pâtisserie et à la confiserie. Pourquoi avoir choisi ce thème ? Pour deux raisons. D’abord, notre dernière participation à l’émission de Stéphane Bern, Comment ça va bien ? (janvier 2015) assurée par ma fille Maïna, vice-présidente de l’Association pour le Rayonnement du Savoir-vivre et du Protocole, a porté sur le service et la dégustation des gâteaux. Ensuite, je souhaitais rendre hommage au «pâtissier des rois », mon ami S.G.Sender qui m’a accordé des entretiens passionnants sur son art.

J'ai rencontré Sender alors qu'il était en train de réunir dans son musée de la pâtisserie des copies de tous les gâteaux monumentaux qu'il avait élaborés pour les grandes cours d 'Europe, du Moyen Orient et d 'Asie, ce qui lui avait valu le surnom de "Pâtissier des Rois".

En fait, il avait également travaillé pour les grands palais présidentiels, à

Paris comme aux Etats Unis.


Il avait passé sa vie dans les avions, courant d'une capitale à l'autre pour couronner les diners officiels, les mariages princiers, les visites d'Etats de ses extraordinaires constructions très souvent hautes de 2 à 3 mètres.

Sender se voulait surtout un confiseur car il considérait que l'art du sucre l'emportait par sa complexité et ses prouesses techniques sur le travail du

pâtissier.


D'origine belge, héritier lui-même d'une grande famille de confiseurs pâtissiers, il tenait ses secrets de fabrique des maitres comme Antoine Carême qui inventa la pâtisserie moderne à l'époque de Napoléon.

Il abondait en souvenirs et anecdotes dont la plus fameuse touchait la reine d'Angleterre, Elisabeth « Queen Mum » à laquelle il avait appris à tourner les oeufs en neige. La cour d'Angleterre restait sa préférée. Son chef d'oeuvre avait été conçu pour le mariage de Charles et Diana.

Toute sa fortune, il l'a utilisée pour constituer la plus grande collection de livres de pâtisseries et confiseries du monde. Ce bibliophile impénitent était capable de se rendre à l'autre bout du monde pour un seul livre présenté en

salle des ventes à Tokyo ou à Boston.


Sender nous a quittés le 12 juillet 2009, plein de nostalgie pour l'époque qui l'avait sacré "pâtissier des Rois" et il regrettait surtout le déclin de l'art du sucre, des gâteaux sculptés, de la confiserie artistique.

LA PATISSERIE ET LA CONFISERIE EN FRANCE

« Babas, madeleines ou croquembouches font partie de notre patrimoine. Ils ont la saveur de notre enfance. Ils sont le symbole de toutes nos fêtes, l’aboutissement d’un art qui n’a d’autre but que de nous rendre heureux. Que de passion, de talents et de savoir-faire il aura fallu pour l’élaboration de ces merveilles gourmandes ! » Joël Robuchon

Qu’appelle-t-on dessert ?

Le mot « dessert » apparaît en pleine période de la Renaissance, en 1539, pour désigner le dernier service du repas, alors constitué de fromages, de pâtisseries, de dragées et de confitures. Aujourd’hui il ne s’applique plus qu’à ce qui est servi après les fromages, donc à des mets sucrés, en particulier des gâteaux. Chez les Grands, comme à la Cour, le mot dessert était proscrit : il fallait dire « le fruit ».

De tout temps le dessert a été considéré comme un moment heureux et festif au point qu’on a toujours menacé les enfants turbulents de les priver de dessert. Plus que la fin du repas, le dessert en est donc le couronnement.

Un usage est resté de cette époque ancienne : le dessert doit être servi sur une table entièrement desservie. Autrefois on retirait même la nappe.

La coutume consistant à séparer le dessert du repas qui le précède date de la Rome Antique où les friandises, les pâtisseries et les « gâteaux africains » étaient servis sur des « secondes tables » (mensae secundae). En fait ces « secondes tables » étaient en général vouées à des manifestations de débauche.

Le dessert et le sucre

Le dessert est lié au sucre et cela en explique le durable succès.

Dès l’Antiquité les hommes utilisèrent le miel produit par les abeilles. On sait que les moines à qui l’on doit l’invention de nombreuses pâtisseries et confiseries étaient d’excellents apiculteurs.

Une autre source naturelle : le miel de roseau. D’abord sauvage, cette plante originaire de Nouvelle Guinée fut ensuite cultivée en Inde et en Chine. Les Grecs et les Romains en importaient des quantités. En sanscrit cette plante s’appelait « sarakara ». Les Arabes, qui en assuraient le transport jusqu’en Europe, disaient « sukkar », d’où les mots « zucchero » en italien et « sucre » en français. Les botanistes ont établi que ce fameux roseau à miel n’était rien d’autre que la canne à sucre.

Le miel de roseau n’était pas seulement utilisé comme aliment. Il servait aussi en médecine.

Les Vénitiens supplantèrent peu à peu les Arabes dans le négoce du sucre de canne. A partir du 15ème siècle, les Européens en importent de fortes quantités d’Inde.

La conquête de l’Amérique changea la donne puisque désormais les Espagnols inaugurent la culture de la canne à sucre dans les Caraïbes. Les Français prennent une place prépondérante sur ce marché fructueux et prospère grâce à la colonisation de la Martinique et de la Guadeloupe.

Le sucre fit la fortune du commerce extérieur de la France jusqu’à ce que, au début du 19ème siècle, on sût exploiter et raffiner le sucre de la betterave. Il s’ensuivit une formidable ère de prospérité dont tirèrent habilement profit pâtissiers et confiseurs français.

Les grandes dates de la pâtisserie française

Le Moyen Age

Le Moyen Age n’ignorait pas la pâtisserie mais n’en eut, jusqu’au 15ème siècle, qu’une pratique rudimentaire réduite aux flans et aux pains fermentés. On projetait de la pâte dans de l’eau bouillante avant de la faire cuire sous la cendre : c’étaient des fouaces. Il faut attendre 1440 pour que la profession de pâtissier soit officialisée et que la production, où se mêlent le salé et le sucré, se diversifie : preuve en est l’abondante liste de pâtisseries, apparues à cette époque, qui subsistent aujourd’hui…même si leurs recettes ont considérablement évolué !

Parmi les produits qui ont eu un grand succès et qui ont disparu : les nieules, les oublies et les échaudés.

  • Les nieules étaient des pâtes très fines, vaporeuses. Pressées à l’aide d’un fer, elles étaient distribuées aux fidèles lors de cérémonies médiévales (notamment à la Pentecôte.)
  • Les oublies sont également d’origine rituelle comme leur étymologie l’indique : elles viennent du mot latin « oblationes (Les oblations consistent en des offrandes faites à Dieu). Les oublies sont d’abord faites en pain enzyme comme les hosties mais se distinguent de celles-ci par le fait qu’elles ne sont pas consacrées. On continuera des siècles durant à parler d’oublies à propos de toute pâtisserie fine au fer. Elles étaient principalement vendues dans la rue par des colporteurs jusqu’à ce qu’une ordonnance de police en interdise le commerce en 1722 pour des raisons d’hygiène. Elles réapparurent néanmoins peu après sous l’appellation de « plaisirs ». Les « marchandes de plaisirs » remplacent alors les marchands d’oublies dans les rues et sur les parvis des églises.
  • D’origine albigeoise et apparus sous Philippe Auguste, les échaudés (ou gimbelettes) étaient faits d’une pâte d’abord ébouillantée puis refroidie, et façonnés de différente manière : ronds à bord festonnés, en cœur, triangulaires. Selon leurs recettes propres, ils prennent toutes sortes d’appellations : flagels, gobets…

Citons maintenant les cinq grandes inventions médiévales parvenues jusqu’à nous : les croissants, le gâteau des rois, les gaufres, les crêpes, le pain d’épices.

  • D’origine religieuse, les croissants, dont la première représentation date du 5ème siècle, ont un rapport lointain avec le culte antique de la lune. Au 10ème siècle on les appelle panem lunatum (pain de lune). Très courant au Moyen Age, le croissant est souvent appelé cornudeau (petite corne).
  • Le gâteau des rois : la fève permet de désigner la personne qui deviendra le roi de l’assemblée se partageant une galette feuilletée le jour de l’Epiphanie (fête commémorant la visite des rois mages à l’enfant Jésus). D’origine païenne, cette tradition a été adoptée par les chrétiens et, au Moyen Age, pratiquée par toutes les corporations de métiers qui élisaient ainsi leur « roi » pour toute l’année. A cette époque la coutume voulait déjà qu’un enfant se glisse sous la table pour énoncer les noms des personnes à qui devaient échoir les parts découpées.
  • Les gaufres apparaissent dès le 13ème siècle, vendues, toutes chaudes, par des marchands ambulants dans les rues et sur le parvis des églises.
  • Les crêpes : c’est le gâteau de la Chandeleur qui commémore la présentation du Christ au temple quarante jours après Noël. Le mot Chandeleur évoque la procession accompagnée de chandelles qui est effectuée par les croyants ce jour-là. La coutume assure, dès le Moyen Age, que la chance sourira toute l’année à celui qui fera sauter la crêpe dans une poêle en tenant une pièce d’or dans la main droite.
  • Le pain d’épices et le pain d’anis sont de loin le premier dessert du Moyen Age, consommé par toutes les classes de la société. Les moines, s’inspirant de recettes antiques, fabriquaient ce pain au miel qui avait l’avantage de se conserver. Pour effacer son origine païenne on l’associa à l’image de saint Nicolas et on l’orna d’un motif religieux (en général une église gravée sur la croûte). Les pâtissiers laïcisèrent ensuite les motifs. En utilisant les moules des pains d’épices ils diversifièrent leur production : pains anisés, décors de glaçures, galettes suisses…

Le Moyen Age n’ignorait pas non plus la confiserie. On lui doit deux innovations majeures, les bonbons (appelées alors « les épiées ») et la confiture, rapportés des Croisades, où l’on s’est initié au sucre de canne.

  • Très chers, parfumés de condiments et d’aromates, les bonbons étaient réservés aux classes les plus favorisées qui les consommaient à la fin des repas, accompagnés d’un verre de liqueur. Ils s’offraient également aux dames que l’on courtisait et aux juges que l’on voulait amadouer.
  • Les confitures proviennent aussi du Moyen Orient où l’on découvre de nouvelles sortes de fruits. A la fin du Moyen Age, la France est gagnée par l’engouement des confitures (prune, myrtilles, angélique, violette…) qui servent tout autant de remèdes que d’aliment. Quant aux «massepains », ce sont des gâteaux fourrés à la confiture.

On attribue au Moyen Age la création des entremets. Il est vrai que nul banquet médiéval ne se déroulait sans entremets, mais le mot ne renvoyait pas alors à une gamme de douceurs sucrées (crèmes, mousses, etc…)

« Il s’agissait au Moyen Age, expliquent S.G Sender et M. Derrien dans leur monumentale Grande Histoire de la Pâtisserie-Confiserie française (édition Minerva), d’un spectacle. Différents divertissements furent imaginés afin de faire patienter les convives durant les intervalles entre les services des festins. Ces moments intervenaient entre les mets, d’où leur nom, remplacé plus tard par intermède. Ils furent à la mode, en France et en Italie (à la cour de Florence) jusqu’à la fin du 16ème siècle. »

Aucun lien entre l’entremets médiéval et les entremets modernes ? Si, la présence du sucré, symbole de la fête. Selon les mêmes auteurs : «C’est après les services (composés de viandes) que le seigneur levait sa coupe, afin que commence la première partie de l’entremets. Il s’agissait d’abord de danses, de chants, de simulacres de combats (quelquefois même navals). Après ce moment, il était courant d’asperger les convives d’eaux de senteur. Du plafond pouvait tomber, à la surprise générale, une pluie de bonbons variés. »

La Renaissance

Au 16ème siècle, en France, le roi des gâteaux était encore le pain d’épices, à base de miel alors que les Italiens avaient beaucoup d’avance en matière de variétés et de qualité. En effet ils avaient acclimaté le fameux « roseau à miel » (de fait la canne à sucre) en Sicile et réussi à résoudre la complexe question du raffinage. Dans le domaine des liqueurs ils avaient aussi beaucoup progressé en mettant au point les techniques de distillation.

Catherine de Médicis épouse d’Henri II introduisit l’art sophistiqué de la pâtisserie italienne à la Cour française. Elle donna un fabuleux essor à la gastronomie et à l’art de la table en faisant venir en France les cuisiniers, les pâtissiers et les glaciers de Florence.

  • Les apports majeurs de Catherine de Médicis à la pâtisserie française sont la brioche importée de Florence, les biscuits à la cuillère et les pièces montées qui, lors des banquets d’apparat, pouvaient atteindre des proportions considérables, composées de douceurs en pyramide et au décor complexe. Elles sont à l’origine du Haut décor.
  • Il faut mettre à l’actif du génial chef de Catherine de Médicis, Popelini, deux innovations majeures qui feront évoluer tout l’art de la pâtisserie : la pâte à choux et la frangipane appelée à remplacer la polenta sucrée. Néanmoins la polenta survécut et eut une importante descendance sous diverses préparations : gaudes de Besançon, matelins de Lyon et de Grenoble, milliasses de Bordeaux et de Cahors, rimottos de Périgueux et d’Agen…

La confiserie progressa au même rythme avec la confection du nougat

constitué de noix confites dans du miel et l’introduction des glaces.

A partir des recettes ramenées par Marco Paolo de Chine en 1292, les Italiens sont les premiers Européens à maîtriser au début du 16ème siècle la réfrigération artificielle. Les célèbres glaciers de Catherine de Médicis en imposèrent la mode à la cour de France.

Apparut à cette époque une pièce maîtresse de la table, le surtout à confiserie qui ne cessa de gagner en ampleur au siècle suivant : « Le surtout à confiserie, écrit Annie-Perrier-Robert dans Bonbons et Friandises (Hatier 1995), constitua au fil des siècles, une des pièces maîtresses de la table d’apparat. Placé en son centre, il était destiné à porter, dans des coupelles étagées, diverses sortes de sucreries. Le 17ème siècle le conçut en argent et, de ce fait, le rendit plus précieux qu’il ne l’était auparavant. La mythologie inspirait souvent les motifs de la décoration. Personnages allégoriques, arbres et fleurs s’y côtoyaient avec élégance. Certains de ces objets pouvaient être de grande taille, jusqu’à un mètre de hauteur…Le siècle des Lumières vit le triomphe de ce « milieu de table » qu’il adapta à son goût des rocailles et des pastorales. Mais l’engouement pour les architectures de sucre éphémères devait, à la fin du 18ème siècle, prendre le pas sur le surtout d’orfèvrerie. »

L’époque classique

Le 17ème et l 8ème siècles engagèrent la pâtisserie vers le raffiné, l’artistique et le grandiose sans remettre en cause les bases acquises sous Catherine de Médicis. Les grandes maisons se pourvurent de maîtres en pâtisserie au talent réputé. De nombreux et importants ouvrages, consacrés à l’art de la pâtisserie sont publiés et incitent les nobles du 18ème siècle à mettre eux –mêmes la main à la pâte. Parmi les grands succès du temps il faut citer le croquembouche à la Soubise et l’apple cake à la reine Anne. Le peuple, pour sa part, se contente de gâteaux et confiseries traditionnels : beignets, gaufres, rissoles, crèpes, casse-museaux et massepains, ou régionaux : gâteaux razis d’Artois, tuées de Normandie, croquets de Reims, calissons d’Aix, talmousses de Saint-Denis, craquelins de Gonesse…

Vers 1750, la découverte de la levure biologique, réalisée à partir du houblon de la bière, entraine d’importantes innovations en matière de fabrication. D’autres progrès marquent l’époque des Lumières qui perfectionne la réfrigération et les fours et met au point des machines comme le pétrin mécanique ou le broyeur de cacao. En Allemagne, le chimiste Margrapf réussit à isoler le sucre de la betterave : on sait la portée exceptionnelle de cette invention qui ne sera pleinement exploitée qu’à partir de 1810.

Nous avons hérité de cette époque quelques uns de nos grands classiques : les macarons, le kugelhopf , les chaussons, les madeleines, les nonnettes, les pets-de-nonne.

  • D’origine italienne, les macarons sont constitués d’une pâte d’amandes savoureuse. Consommés à la cour de France dès 1553, ils font fureur sous la régence d’Anne d’Autriche. Nancy en fait une spécialité réputée. Le macaron est l’ancêtre du petit-four.
  • Né en Autriche (en 1609), le kugelhopf devint le régal des Alsaciens qui adaptèrent la recette à leur goût.
  • La recette des chaussons est décrite par La Varenne dans l’ouvrage de référence qui lui est attribué, Le Pâtissier français (1653).
  • Les madeleines ont été inventées par Madeleine Simonin, la cuisinière du cardinal de Retz, alors qu’en 1661 il résidait à Commercy. D’où leur appellation : « les madeleines de Commercy ».
  • Les nonnettes doivent leur nom aux religieuses de Remiremont, dont l’invention conquit toute la France au 18ème siècle. Ces petits gâteaux ronds étaient bizarrement considérés comme un produit de boulangerie.
  • Le chef de la maison d’Orléans eut l’idée de fabriquer des beignets à partir de la pâte à choux en 1770 et de leur donner le nom saugrenu de pet-de-nonne qui amusa toute la cour. Une légende attribue cette appellation à une malheureuse nonne qui aurait lâché un vent en servant ce dessert à son archevêque.

En dehors de ces pâtisseries, les chefs mettent au point des procédés à l’origine de nombreuses créations : la crème Chantilly et la meringue

  • La crème Chantilly est une invention du célèbre Vatel, le maître d’hôtel de Fouquet à Vaux. Devenu le chef du prince de Condé, il donna le nom de son château au fameux entremets.
  • La meringue : Marie-Antoinette adorait confectionner elle-même cette pâtisserie inventée par un Suisse établie en Saxe –Cobourg en 1720.

La confiserie se dote pour sa part de deux vrais trésors : les pralines et les dragées.

  • Les pralines : l’idée d’enrober de sucre les amandes pilées revient au maître d’hôtel du duc de Richelieu, Plessis-Pralin (1731).
  • Les dragées sont l’œuvre du confiseur Pecquet qui, en 1750, réussit l’enrobage des pois sucrés. Le roi raffolait des dragées de Pecquet qui fit rapidement fortune avant d’être anéanti par un concurrent à l’enseigne du Grand Monarque.

Enfin on ne saurait quitter le Grand siècle sans faire mention de la révolution provoquée par la découverte du chocolat qui bouleversera profondément le goût et les mœurs.

Importé du Mexique au milieu du 16ème siècle, le chocolat conquit la France à partir du Pays basque grâce à des confiseurs en relation avec l’Espagne. C’était le délice de Marie-Thérèse d’Autriche, l’épouse de Louis XIV. Le service du chocolat, chaud ou glacé, s’accompagnait d’un rituel raffiné et demandait une vaisselle en porcelaine spécialement conçue pour cet usage (tasses et verseuse). La production du cacao à la Martinique à partir de 1680 engendra un engouement général en France.

Qui veut savoir à quoi ressemblait une boutique de pâtissier au 18ème siècle, se rendra 51 rue Montorgueil à la célèbre pâtisserie Stohrer, créée en 1730 par Nicolas Stohrer, le pâtissier du roi de Pologne, Stanilas Leczinski et de sa fille, Marie, l’épouse de Louis XV. Le bâtiment et ses décors sont classés monument historique et l’établissement y est toujours en activité. On y dégustera notamment le baba au rhum créé par Nicolas Stohrer pour le roi de Pologne à partir d’une brioche sèche qu’il arrosa de vin de Malaga et parfuma au safran avant d’y ajouter crème pâtissière, raisins secs et raisins frais. Le roi choisit le nom de son héros romanesque favori, Ali Baba, pour baptiser sa gourmandise également favorite. Grande amatrice de haute pâtisserie, Elizabeth II d’Angleterre ne put résister à la tentation de visiter la pâtisserie Stohrer lors de la visite officielle qu’elle fit en France afin de commémorer en 2004… le centenaire de l’Entente cordiale entre la France et l’Angleterre.

L’époque moderne

.La pâtisserie et la confiserie atteignirent des sommets inégalés au 19ème siècle, porté par des maîtres mythiques, en tout premier lieu Antoine Carême qui codifia, sous la Restauration, l’art du sucré. D’exceptionnelles pièces d’apparat accompagnent les grandes réceptions. De grands chefs, comme Gouffé, Lebeau, les frères Jullien s’illustrent, dans l’art du sucre filé, du nougat, du pastillage, des bonbons fondants, des glaces cuites, des marrons glacés. Les consommateurs plébiscitèrent les nouveaux desserts à la mode : le vacherin, saint honoré, le croquembouche, les allumettes, les éclairs, le condé aux amandes, le savarin, le wedding cake, la bûche de Noël, la pêche Melba…

  • Le gâteau meringue à la crème chantilly, venu de Suisse, a donné le vacherin, que la reine Marie-Antoinette adorait confectionner. Au milieu du 19ème siècle l’invention des douilles, des poches et des cornes, permit de vulgariser cette douceur compliquée.
  • Assemblage de fruits glacés au caramel, le premier croquembouche est servi par Carême au prince Berthier en 1815.
  • Inventées par un pâtissier suisse installé en Bretagne (1840), les allumettes furent concurrencées par le condé aux amandes, voué à une diffusion mondiale.
  • Le saint-honoré est l’oeuvre de la maison Chiboust en 1847 qui, de fait, s’est inspiré d’un gâteau suisse. Les frères Jullien perfectionnèrent cette pâtisserie à base de petits choux, appelée à un succès considérable.
  • Création d’Auguste Jullien, le savarin est fait d’une pâte à baba accompagnée d’une liqueur.
  • D’origine anglaise, le wedding cake (le gâteau de mariage), apparu au 19ème siècle, souvent de très grande taille (plusieurs mètres de haut), exige une préparation complexe et une cuisson longue de plusieurs heures.
  • La bûche de Noël : en 1874, le pâtissier Charabot eut l’idée, pour le Réveillon, d’adapter l’antique tradition de la bûche provençale que l’on jetait au feu, arrosée de vin, de sel et de cire, pour faire des vœux la nuit de Noël et d’en faire une fabrication biscuitée et crémeuse.
  • La pêche Melba : cette préparation simple, une pêche pochée au sirop vanillé, est due à Escoffier qui lui donna le nom d’une célèbre cliente qui en raffolait, la chanteuse Melba.

Une invention apparemment modeste eut une portée considérable : Trottier mit au point des moules et des cercles, ce qui eut pour effet le remplacement de l’ancienne tourte par la tarte et la création de nouveaux gâteaux comme le gâteau breton décoré à l’aide d’une douille à six dents.

A la même époque le progrès technique transforma la production de masse avec la biscuiterie industrielle qui s’appuie sur des procédés mis au point en Grande-Bretagne. S’ouvrit l’épopée de la Biscuiterie Nantaise.

La principale évolution du goût à l’époque contemporaine a trait à l’appétence des consommateurs pour le chocolat dans la pâtisserie et la confiserie. On le constate avec le succès des profiteroles, éclairs et religieuses

  • Antoine Carême est le père des profiteroles moulées à la main. Les éclairs n’apparaissent qu’en 1850 à Lyon après l’invention de la poche. Quelques années plus tard la famille s’agrandit aux religieuses et aux choux glacés.

En même temps que la pâtisserie, la confiserie s’enrichit d’innovations appelées à un grand avenir : bonbons à la liqueur, fondant, nougatine.

  • Les bonbons à la liqueur : le moyen de couler de la liqueur à l’intérieur des bonbons est due à un confiseur parisien du nom de Gilé (1821). Cette découverte fit rapidement fureur et révolutionna les techniques de la confiserie. Gilé est également l’inventeur du fondant, bonbon recouvert de sucre candi, qui fond en bouche.
  • La nougatine : une savante friandise mise au point par un confiseur de Nevers, Bourumeau, qui se vit récompenser par la reconnaissance de la cour impériale de Napoléon III qui en fit son régal.

Alors que s’inventent toutes ces merveilles gourmandes, le public des consommateurs change aussi de comportement. Axée hier sur les salons, la pâtisserie-confiserie est passée dans la rue. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire ce qu’en dit le Guide de Paris, signé Adolphe Joanne, dans son édition de 1863 : « De 3h à 5h de l’après-midi, il est rare que les boutiques des pâtissiers parisiens les plus renommés ne soient pas remplis de femmes élégantes, d’hommes du monde le plus distingué, qui viennent y manger un gâteau trempé d’un vin de liqueur. Lorsque par hasard, au milieu d’une course prolongée, on sent son estomac tiraillé par une pointe d’appétit, le mieux est de prendre un gâteau qui, sans nuire au dîner, satisfait provisoirement la faim….Pour les personnes qui veulent connaître la pâtisserie parisienne par ses confections de choix, nous nommerons dans le passage des Panoramas, Félix ; place de la Bourse, Julien ; dans le passage de l’Opéra, le Gâteau d’Amandes ; rue de la Paix, Carême et les pâtisseries anglo-françaises situées rue Royale et rue de Rivoli. Les Parisiens n’aiment pas moins les bonbons que les gâteaux : aussi Paris compte-t-il un grand nombre de confiseurs dont les produits sont justement renommés. Il n’est certainement aucun étranger qui ne veuille apprécier par lui-même le mérite de cette industrie. »

Si Paris est devenu au 19ème siècle la capitale européenne de la pâtisserie, cela n’empêche pas les maisons ayant pignon sur rue de se livrer à une concurrence impitoyable. Des idées « marketing » qui n’ont rien à envier à notre époque assurent la notoriété à certains commerçants spécialement inventifs. Il en est ainsi de la pâtisserie Ragueneau à propos de laquelle S.G Sender et M. Derrier relatent cette anecdote : « La pâtisserie Ragueneau était célèbre pour sa vitrine décorée de pyramides de brioches, alors très en vogue. M. Ragueneau était amateur de théâtre et de poésie au point que, pour satisfaire sa passion, il avait l’habitude d’échanger ses gâteaux contre des billets de spectacle. »

Le 20ème siècle se caractérise par la multiplication des talents et par le raffinement des techniques héritées du siècle précédent. L’effort porte principalement sur le travail du sucre d’art sous ses différentes expressions : tiré, filé, soufflé, tourné, coulé…Par ailleurs la technologie poussa à la perfection la réfrigération, les fours et les pétrins. La surgélation résolut le problème de la conservation.

Comme dans le passé des « géants » de la pâtisserie française continuent aujourd’hui de triompher dans le monde. La génération précédente comptait des chefs à la réputation mondiale, tels Sender « le pâtissier des rois » et Gaston Lenôtre. Ce dernier, à la fois pâtissier, confiseur et à partir de sa Normandie natale puis de sa boutique rue d’Auteuil, forma dans son école, créée en 1971, des dizaines de grands chefs de toute nationalité. Le Pré Catelan et le Pavillon Elysée passèrent sous enseigne Lenôtre en même temps qu’étaient fondés des établissements à Berlin, à Ryad et à Las Vegas.

De nos jours, des émissions de télévision populaires manifestent l’engouement sans cesse accru des Français pour leur patrimoine gourmand et sucré : chacun, désormais, veut devenir l’égal des maîtres.

Quant aux chefs d’aujourd’hui, ils perpétuent la tradition de leurs prédécesseurs : ils sont les ambassadeurs de leur art, du goût français et de formidables entrepreneurs. Parmi les plus réputés, on peut citer :

  • Pierre Hermé : il a commencé sa carrière auprès de Gaston Lenôtre avant de devenir le chef-pâtissier de la maison Fauchon entre 1986 et 1996, fonction qu’il exerce ensuite chez Ladurée en 1997 et 1998. Il fonde ensuite « Pierre Hermé Paris » avec Charles Znaty. Leur première boutique, installée à Tokyo, date de 1998. Elle sera suivie de beaucoup d’autres. En 2008, Pierre Hermé ouvra sa manufacture de chocolats et de macarons en Alsace.
  • Christophe Michalak : à la fois une encyclopédie de la pâtisserie et un inventeur de génie, à la recherche des saveurs et des savoir-faire du monde entier. Partager est sa philosophie, d’où sa passion de faire émerger de nouveaux talents comme son fils spirituel Jérôme de Oliveira. Le 60 rue du faubourg Poissonnière est devenu la pépinière de la pâtisserie du 21ème siècle. La masterclass de Christophe Michalak s’est imposée dorénavant comme le lieu de rencontre de la passion pâtissière.
  • Christophe Adam s’est élancé de sa Bretagne natale vers l’excellence internationale : l’atelier Gavroche à Londres, la pâtisserie des frères Roux, le Crillon, le palace Beaurivage à Lausanne, l’entrée chez Fauchon en 1996. Il porte la pâtisserie Fauchon au sommet du luxe et de la saveur, alliant toujours le beau et le bon. C’est lui qui encadre l’expansion internationale de Fauchon vers Monaco, New-York, Moscou, Pékin, Dubaï, Casablanca. Son nom est lié à la pâtisserie snacking, l’exclusivité des boutiques créées sous son nom.
  • Philippe Concini s’est distingué tout autant par ses travaux salés que sucrés. Il a travaillé aux Etats-Unis et au Japon et a acquis sa réputation internationale grâce à son invention des verrines qui joue sur la verticalité et la transparence des mets. Il est le cofondateur de la Pâtisserie des Rêves.

Le service et la dégustation des gâteaux

Les couverts à dessert

Les couverts à dessert, fourchette à gâteaux, cuillère à glace, cuillère à sucre, existent depuis le 18ème siècle. La pelle à tarte apparaît au siècle suivant. Il existe aussi des cuillères de service particulières pour les crèmes et les entremets (compote, mousse, soufflé…)

La fourchette à dessert compte quatre dents à part la fourchette à gâteaux allemande, la Kuchengabel, à trois dents. La fourchette à gâteaux classique se reconnaît au fait que la dent de gauche est plus large que les autres afin d’aider à trancher le gâteau alors que les autres servent à le piquer.

L’introduction de nouveaux mets et de nouvelles boissons entraina à chaque fois la création de nouveaux récipients pour les servir et les consommer. Au 19ème siècle, les manufactures de porcelaine fine rivalisèrent d’ingéniosité et de subtilité pour mettre sur le marché de très beaux produits tels que les chocolatières et les tasses hautes pour le chocolat, les tasses à glace, les assiettes et plats à gâteaux…

La découpe des gâteaux

Elle diffère selon leur forme et leur taille.

Un gâteau rond inférieur à 16cm de diamètre : marquer le centre et découper en deux parts égales, puis couper ces deux parts en 2, et continuer ainsi en fonction du nombre de parts prévues.

Un gâteau supérieur à 16 cm de diamètre : tracer un ou plusieurs cercles intérieurs selon le diamètre du gâteau. Il faut commencer par marquer légèrement le cercle intérieur avant de commencer la découpe. On voit ainsi si le cercle a été convenablement tracé. Ensuite on commence par détailler les parts du cercle extérieur. Un gâteau de 20 cm sera découpé en 18 parts.

Pour les gâteaux de taille supérieure ajouter un cercle pour 10 cm de diamètre en plus.

Il est recommandé de s’aider d’un diviseur à gâteaux en inox, qui marquera les parts avant découpe si on n’est pas un professionnel, surtout pour un gâteau fourré ou à la crème, toujours difficile à découper.

La découpe des tartes et des gâteaux s’effectue devant les invités.

Le service et la dégustation

On présente toujours un gâteau sur un plat approprié à sa forme. Il est servi dans des assiettes à dessert.

La tradition française veut que le convive dépose lui-même sa part de gâteau sur son assiette alors que le service à l’anglaise préconise qu’on la serve sur une assiette.

En famille ou dans un repas amical, on peut demander une part plus petite. Jamais on n’accepte une part de gâteau si on n’a pas l’intention de la manger complètement.

Pour déguster un gâteau ou une tarte on n’utilise que sa fourchette. Une glace ou un pudding se dégustent à la cuillère.

Un millefeuille se positionne sur le côté avant d’être découpé à l’horizontale.

Le gâteau de mariage est découpé par les deux mariés ensemble.

Quand on a fini son gâteau, on dépose ses couverts ensemble sur le côté bas droit de l’assiette : soit à l’américaine (pointes de la fourchette en haut) soit à l’européenne (pointes de fourchette sur l’assiette).

Aucun gâteau ne se mange à la main sauf le biscuit. Ne jamais tremper un biscuit dans une boisson chaude en société.

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5 janvier 2014 7 05 /01 /janvier /2014 18:28

 

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mflecherbonnier@hotmail.fr

 

LES VŒUX  DU PRESIDENT  DE LA REPUBLIQUE.

 

 

 

Les vœux du Président Hollande pour l’année 2014 ont été, dans la droite de ses déclarations télévisées antérieures, notamment de sa prestation lors de la Fête nationale, un exposé programmatique dense et structuré, prononcé sur un ton alerte et sans grand lyrisme. Seul l’hommage rendu aux neuf soldats qui ont donné leur vie à la Nation était empli d’une sincère émotion. En un mot les vœux normaux d’un président normal. Des voeux peut-être plus dirigés vers les relais d’opinion, journalistes et élus, que vers la population elle-même.

 

Nicolas Sarkozy avait déjà adopté un style classique et académique. En revanche, les présidents précédents ont presque toujours apporté une touche personnelle à la cérémonie des vœux. Les chaînes de télévision ne manquent pas de rediffuser chaque année des extraits historiques.

 

Les différences les plus notables tiennent aux vœux du Président aux corps constitués bien que l’ordre en soit réglementé  depuis des décennies: gouvernement avec allocution du Premier ministre et réponse du président ; Conseil constitutionnel, Conseil d’Etat, armées…Pour le corps diplomatique, les honneurs sont rendus dans la cour du palais de l’Elysée par une compagnie et la musique de la garde républicaine. Présentent par la suite leurs vœux le Bureau des Assemblées auquel est joint le Conseil économique, social et environnemental, la Municipalité de Paris, les autorités religieuses, la presse et la Maison du Président de la République      

 

 Valéry Giscard d’Estaing dit y avoir beaucoup réfléchi après son élection, en1974.

 

    « A la fin de l’année, j’ai vu le moment où je devrais présenter pour la première foi mes vœux aux Français. Je savais qu’ils seraient suivis par un long rituel qui débuterait lorsque le gouvernement, conduit par Jacques Chirac, viendrait m’exprimer ses vœux de bonheur et de réussite.      

 

      J’ai demandé que l’on modifie le programme des vœux, en en réduisant l’aspect formel, et en simplifiant la tenue vestimentaire, mais aussi en élargissant les catégories invitées aux cérémonies…

 

      Les vœux, s’ils veulent avoir un sens, doivent  également s’adresser à d’autres personnes, à celles qui sont les plus éloignées du pouvoir, les plus ignorées, et pour lesquelles, sans doute leur expression serait la plus fortement ressentie.

 

      Pouvais-je compléter mes vœux par un symbole qui soulignerait l’égalité des êtres ? J’ai essayé de le faire le jour de Noël. J’ai pensé à ceux qui assuraient un travail de nuit autour de l’Elysée…

 

   Le matin, à 6 heures, Philippe Sauzay est allé attendre l’équipe des éboueurs avenue de Marigny…Ils sont entrés à l’Elysée…L’équipe se composait d’un Français, de deux Maliens et d’un Sénégalais. Nous nous sommes assis autour de la table et nous avons pris du café et des croissants.

 

   Dans un premier temps, le symbole a commencé par étonner. On a souri, en le mettant sur le compte de ma volonté –maladroite- de nouveauté. Puis l’irritation a grandi : pourquoi chercher à troubler les règles du jeu établies ? » (Le Pouvoir et la Vie, 309-311)                           

 

    François Mitterrand a tenu pour sa part à intégrer les « forces vives », particulièrement les syndicats, dans le cérémonial présidentiel. Ce qui n’a pas été remis en cause par son successeur qui y voyait le témoignage de l’évolution de la société. Jacques Chirac a également souhaité que la religion musulmane bénéficie d’une représentation identique à celle des autres religions.

 

   Toutes les allocutions des Présidents sont-elles écrites à l’avance ? Il est certain que les hommes d’Etat d’hier, y compris les ministres, tenaient à écrire eux-mêmes leurs discours importants alors que de plus en plus cette tâche est dévolue à de conseillers, à des « plumes » qui se contentent de mettre en forme des « éléments de langage » façonnés par des communicants. Ce qui explique en grande partie la fadeur desdits discours…A l’époque où les Présidents écrivaient eux-mêmes leurs discours, ils ne se gênaient pas pour se lancer dans des improvisations en marge des écrits.

 

   De façon générale François Mitterrand était disert et les cérémonies des vœux duraient souvent plus longtemps que prévu. Jacques Chirac faisait plus bref tout en restant chaleureux. En 2001 un incident a marqué l’histoire politique de la cohabitation avec Lionel Jospin. Le Premier ministre ne s’était-il pas autorisé à présenter ses vœux aux Français avant le Président de la République ? Il s’ensuivra deux semaines de duels par médias interposés.         

 

© Marie-France Lecherbonnier 

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1 décembre 2013 7 01 /12 /décembre /2013 15:06

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LE SAVOIR VIVRE EST-IL UNIVERSEL ?

 

« Le Savoir-Vivre est-il universel ? », voici  la question qui m’est le plus souvent posée.

 

Mes interlocuteurs songent sans doute à une éventuelle universalité des règles et des bonnes manières telles que nos manuels les édictent.

 

Je reviendrai sur cet aspect des choses. Mais, dans l’immédiat, je veux répondre de façon plus générale : toute société a-t-elle nécessairement un Savoir-vivre ? Ainsi posée, la question obtient une réponse évidente. Aucune société ne peut se concevoir sans obéir à un ensemble de convenances communes qui organise les  relations entre les individus et qui réglemente les rapports humains.

 

La  liste des thèmes communs à ce savoir-vivre universel sont bien connus : l’accueil et les salutations, les positions du corps,  les relations entre les sexes et entre les générations, les manières de se vêtir et de manger,  les marques de politesse et de respect,  l’art du langage, les cérémonies (naissance, mariage, décès), etc… Sur le plan pratique cela se traduit par une infinité d’usages :  quelle tenue ? quelles expressions du visage ? quand garder le silence ? comment marcher ? comment boire ? comment s’incliner? quand passer devant ou derrière ? quelle main tendre ? quand se couvrir ? où prendre place ?...

 

Les manquements à ces usages sont toujours sanctionnés par le corps social, parfois de façon sévère, surtout dans les civilisations traditionnelles. D’où l’accent mis par nombre de sociétés sur l’éducation des enfants, considérée comme la matrice de tout savoir-vivre.

 

Revenons maintenant à la question initiale : le savoir-vivre est-il le même partout ? Evidemment non. Je cite souvent le mot de Georges Duhamel : « Les grandes civilisations se reconnaissent à l’excellence de leur cuisine et au raffinement de leur politesse.» Filons la métaphore : ce qui est commun à la cuisine française, chinoise, arabe, japonaise… c’est leur excellence, mais pour autant ce sont des cuisines différentes. Il en est de même du savoir-vivre. D’où l’importance, quand on se rend à l’étranger, de s’interroger, de se renseigner sur les usages locaux.

 

Pour autant, de même qu’il existe une cuisine internationale, de même il existe un savoir-vivre international qui est une sorte de bonne conduite mondialisée dont il se trouve que le modèle de base soit européen, composé pour l’essentiel d’apports français, italiens et britanniques. Le rayonnement mondial de ce modèle  est lié à celui de l’expansion européenne au cours des siècles précédents. C’est une sorte de langage comportemental universel. Il a été codifié sous le nom de «protocole » pour hiérarchiser et réglementer les relations entre les personnages publics.

 

Au fond, ce qui est universel dans le Savoir-vivre, c’est le respect d’autrui. Vous n’avez pas à réfléchir et encore moins à commenter le fait de retirer vos chaussures ou de vous découvrir pour entrer dans tel ou tel lieu. Si vous souhaitez être respecté d’autrui, respectez autrui. La première des politesses est de s’intéresser aux autres, de leur porter attention.

 

Je  conclurai sur deux points essentiels à mes yeux :

 

- le Savoir-vivre passe à tort pour conservateur, voire réactionnaire. Certes il établit des contraintes pour rendre plus fluides, plus civiles, les relations sociales. Mais il est souvent en avance sur la réflexion politique. Ainsi le Savoir-vivre européen , par exemple, a-t-il accordé la préséance aux femmes dans les relations sociales plusieurs siècles  avant que leur soit reconnue en Europe l’égalité des droits.

 

- le Savoir-vivre européen a souvent à apprendre des autres modèles. J’entendais un jour Hubert Védrine rappeler à juste titre que nous aurions beaucoup à nous inspirer des civilisations traditionnelles quant au respect qu’ils apportent à leurs vieillards…

 

 

© mflecherbonnier              

 

 

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21 novembre 2013 4 21 /11 /novembre /2013 10:32

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mflecherbonnier@hotmail.fr

 

ASSOCIATION POUR LE RAYONNEMENT DU SAVOIR-VIVRE ET DU PROTOCOLE

www.savoirvivreplus.com

 

Marie-France Lecherbonnier, pourquoi avoir pris l’initiative de créer l’Association pour le Rayonnement du Savoir-vivre et du Protocole ?

 

C’est une réponse à la demande grandissante, que je sens aussi bien en France qu’à l’étranger, en matière de bienséance, d’étiquette et de bons usages. Imaginez-vous que chaque jour plus de 300 personnes interrogent ce blog pour se renseigner sur tel ou tel aspect du savoir-vivre ou du Protocole ?

 

Je constate les mêmes besoins d’information et d’échange lors des différentes missions que j’accomplis dans le monde.

 

Qu’apporte de plus une Association ?  

 

Le moyen de communiquer, de confronter ses expériences et ses points de vue. C’est aussi un bon vecteur pour organiser des rencontres et répondre aux besoins de formation.

 

Cette Association est ouverte à tous, professionnels ou non, qui souhaitent participer à l’effort de réflexion,  d’éducation et de recherche dans le champ qui nous intéresse.

 

Quel est votre programme ?

 

Pour le moment nous avons  mis en place des formations dans les domaines où nous  relevons le plus de questions : le savoir-vivre,  les formules de politesse,  la correspondance, les discours, le protocole national et le protocole international.

 

A la demande,  nous sommes capables de répondre à des demandes  spécifiques comme le protocole territorial ou le protocole diplomatique. Nous faisons alors appel à des experts. Pour donner un exemple : nous allons bientôt former au protocole japonais le personnel d’une société française rachetée par un groupe nippon.

 

Où se passeront les formations ? 

 

Le plus souvent  à Paris, mais nous pouvons aussi nous déplacer  en province ou à l’étranger.

 

Exceptionnellement  j’organiserai cette année quatre sessions à mon domicile en Normandie.

 

Et en dehors des formations ?

 

Nous sommes en train de mettre en place un programme de colloques autour de personnalités qui ont joué un rôle éminent dans les relations internationales et dans l’élaboration du Protocole moderne.

 

Nous n’excluons pas non plus le lancement d’un programme de recherche interculturel pour comparer les savoir-vivre des différentes  civilisations.

 

Quelle est votre devise ?

 

Nous avons mis en exergue de notre site www.savoirvivreplus.com cette belle phrase de Georges Duhamel : « Les grandes civilisations se reconnaissent à l’excellence de leur cuisine et au raffinement de leur politesse. »

 

Comme vous le constatez nous soutenons une vision ouverte, moderne et internationale du savoir-vivre. 

 

© Marie-France Lecherbonnier 

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18 octobre 2013 5 18 /10 /octobre /2013 12:24

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PEUT-ON ECHANGER UN BAISER EN PUBLIC ?

 

Un baiser a fait le tour du monde,  celui de ces deux jeunes Marocains cloués au pilori pour avoir joint, publiquement, leurs lèvres dans un baiser amoureux.

Cette anecdote n’a d’intérêt que par son immense impact médiatique.

La télévision nous a montré des assemblées de manifestants sympathisants qui s’embrassaient à bouche-que- veux-tu. Un micro-trottoir a interrogé des jeunes Marocains  expliquant que  « ça ne se fait pas », que « c’est impoli »

Loin de moi l‘idée de répondre par « oui » ou par « non »  à la question que je pose en liminaire ! L’intérêt du sujet est surtout de donner à s’interroger sur la manifestation de l’intime en public.

La question n’est pas simple. L’art et la littérature sont adeptes du baiser public. Rappelons que la célèbre sculpture de Rodin est une commande  d’Etat.  Et le sensuel Baiser de l’Hôtel de Ville, photographié par Doisneau s’affiche dans le monde entier. Une  chanson de Brassens câline les amoureux qui se bécotent sur les bancs publics…

Le baiser renverrait-il exclusivement à la sexualité ? Certes le chaste baiser échangé par les jeunes mariés devant Monsieur le Curé et devant Monsieur le Maire promet de proches et embrasées voluptés. Si les Chinois et la plupart des Africains condamnent le baiser public, c’est qu’ils y voient également l’image de préliminaires sexuels.

Pour autant, est-ce que le baiser sur les lèvres, voire sur la bouche, a toujours une connotation sexuelle ? Non. On se rappelle le spectacle donné par les hiérarques soviétiques échangeant de formidables  patins,  on sait aussi que les familles américaines pratiquent couramment la bise sur les lèvres.

Il n’y aurait donc pas en soi une signification unilatérale du baiser. Cependant dans nos sociétés où l’amour reste une valeur fondamentale dans les relations privées et intimes, le baiser partagé, en dehors du plaisir qu’il procure, a une forte charge  symbolique. Donner sa bouche veut dire « Je t’aime » dans l’imaginaire collectif. Le cinéma a fait de la scène du baiser le prototype de l’accord sentimental. A contrario la prostituée qui vend son corps, qui brade son intimité,  « n’embrasse pas ».  Il lui reste au moins cette liberté, la liberté de ne pas feindre les sentiments.

Pourrait-on en conclure que si l’on aime, on peut s’embrasser en public ?

La censure sociale, quoi qu’on dise, joue un rôle prépondérant. L’exemple du baiser marocain en constitue la preuve. Mais balayons aussi devant notre porte. Nous venons de reconnaître aux homosexuels le droit de se marier, le droit de s’aimer. Or, ne reste-t-on pas choqué par le spectacle de deux hommes ou de deux femmes échangeant un baiser un « french kiss » dans la rue ou dans le métro ?  Il faut souvent laisser du temps au temps pour que les nouveaux comportements privés soient admis et s’installent.     

Je retiens pour ma part la portée politique du baiser marocain. Il s’inscrit, à cet égard, dans la tradition de la plus célèbre représentation artistique d’un baiser, le tableau de Francesco Hayez où l’on voit un patriote austro-hongrois embrasser une femme appartenant au clan opposé.  Au-delà de tous les interdits, un couple construit l’avenir dans sa passion partagée…

© Marie-France Lecherbonnier

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22 septembre 2013 7 22 /09 /septembre /2013 16:03

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COMMENT ORGANISER UNE CEREMONIE DE JUMELAGE ?

  

 

Pourquoi ai-je choisi le thème du jumelage pour dialoguer avec vous aujourd’hui ?  D'abord parce que cette conférence est prononcée sous les auspices de Cités Unies France. Ensuite parce que ce thème permet d’aborder de nombreux sujets liés au Protocole.

 

 Vous pourrez me dire que près de 60 ans après l’invention du jumelage et après des milliers de conventions enregistrées, ces questions ne sont  plus d’actualité. Ce n’est pas le cas. Grâce à la coopération décentralisée, de nouveaux acteurs, de nouveaux pays sont entrés dans le cercle de la solidarité internationale. Il est donc de plus en plus important de faire place aux exigences de l’interculturalité, de respecter l’autre dans sa différence, de renforcer et d’actualiser les savoir-faire en toutes choses.

 

En un mot, on ne se marie plus seulement entre soi, entre Européens de même culture. On se marie avec des Asiatiques, des Africains, des Sud-Américains. Projet exaltant pour les citoyens du monde entier. Projet qui restaure la philosophie fondatrice du jumelage. 

 

 

Rappelons d’abord qu’un jumelage est le résultat d’une longue approche avec un partenaire étranger que l’on aura choisi pour toutes sortes d’affinités culturelles, économiques et sociales.

Le comité de jumelage et la mairie auront longuement mûri l’évènement en partenariat avec leurs homologues de la ville jumelée.

C’est dans cet esprit que seront organisés les moments forts de la cérémonie de jumelage.

Quatre points essentiels devront être mis à l’ordre du jour des réunions préparatoires.

LANCER LES INVITATIONS

LA SIGNATURE DU PACTE DE JUMELAGE

LES RECEPTIONS OFFICIELLES

LES OUTILS DE COMMUNICATION ET DE SUIVI

 

LANCER LES INVITATIONS               

Les invitations officielles sont un vrai casse-tête, chacun le sait et il faut beaucoup de méthode pour résoudre les problèmes.

Il faut d’abord distinguer les invitations que l’on fait par lettre et celles que l’on fait par carton d’invitation.

De façon générale les hautes personnalités ne sont pas conviées par un carton d’invitation mais par une lettre.

En plus et en amont des lettres, il est souhaitable de rendre visite aux autorités dont on souhaite la présence, voire la présidence. Vous connaissez la mention classique « Sous le haut patronage de … » ou « Sous le parrainage de… »

Les invitations officielles sont envoyées trois semaines avant la cérémonie de jumelage, aux administrations  et aux responsables des collectivités locales.

Le Préfet appelle tous les égards. En effet c’est sous ses auspices qu’ont été préparés les dossiers administratifs et financiers ayant abouti au jumelage

Une place spéciale est également à accorder aux autorités étrangères lors d’un jumelage. Donc il faut prévenir très en amont l’ambassade ou le consulat du pays de la ville jumelle pour l’inviter à participer à l’évènement. Les jumelages avec les pays francophones se multiplient. C’est un bon moyen pour y associer la communauté issue de ces pays qui vit dans votre ville.  

Le plus simple pour éviter un impair est de s’appuyer sur la liste protocolaire de votre département. Elle figure en préfecture. Vous pouvez aussi vous référer à la liste des préséances  que vous trouverez sur le site de Légifrance. C’est une adaptation du décret de 1989 aux réalités départementales. Ai-je besoin de vous  rappeler à ce sujet que l’ordre des préséances varie en France selon les régions concernées : Paris, province, Dom-Tom et  que des modifications lui sont périodiquement apportées ?

Puisque vous êtes nombreux à vous intéresser aux relations internationales, je me permets de vous rappeler que tous les Etats n’ont pas la même conception du Protocole national et que nombre d’entre eux n’ont pas de liste de préséances. Je reviens juste du Gabon où j’effectuais une formation d’agents du Protocole.  Le président Bongo n’a jamais pris le risque d’édicter un protocole d’Etat par crainte d’effaroucher les corps intermédiaires et les chefferies traditionnelles. A défaut de protocole d’Etat, c’est la Constitution qui sert de référence pour les préséances.  Par conséquent il n‘est pas vain d’expliquer à nos hôtes étrangers la manière dont est construit notre propre Protocole.  

Venons-en aux cartons d’invitation.

Comment rédiger les cartons d’invitation ?

Pour un jumelage ou un anniversaire de jumelage doivent impérativement figurer sur le carton d’invitation :

Les armoiries des deux villes,

Les noms des personnalités ayant la préséance avec la mention « Sous le Haut patronage de… »

 Les autorités invitantes (la ville jumelle et la ville d’accueil,

Le lieu et la nature de la réception,

La date et l’horaire.

La formule traditionnelle d’invitation est «  serait très honoré de votre présence à… »

Enfin, n’oubliez pas que le carton d’invitation doit-être rédigé  en deux langues

Ne faites jamais  imprimer un carton d’invitation avant d’avoir eu le retour des personnalités y figurant. Les usages et les exceptions sont multiples. Par exemple on proclame que les rangs et les fonctions ne se délèguent pas. Or, dans la réalité, les adjoints des chefs de l’exécutif peuvent remplacer leurs Présidents dans de nombreuses  circonstances.

On ne lésinera pas sur le nombre d’invitations

Les associations seront choyées. On n’hésitera pas à donner un grand nombre de cartons d’invitation aux associations représentant la communauté nationale du pays de la ville jumelle, pour qu’elles les distribuent elles-mêmes. Il en sera de même pour les associations d’habitants. Les objectifs de la coopération décentralisée peuvent rencontrer scepticisme ou opposition. D’où le soin à apporter aux relais actifs de la population.

Les milieux culturels, économiques, sociaux et sportifs font bien entendu partie des invités privilégiés.

Quant aux citoyens, ils seront prévenus par le bulletin et le site municipaux, qui  présenteront un dossier de la ville jumelle et le programme des festivités.

LA SIGNATURE DU PACTE DE JUMELAGE

Voyons maintenant le moment fort du jumelage. Voici enfin arrivé le jour tant attendu. Les visiteurs de marque sont là, les délégués de la ville jumelle et la population sont rassemblés.

Où se passe la cérémonie ?

Le plus souvent, à l’hôtel de ville mais il n’est pas exclu de choisir un lieu plus vaste si le public promet d’être très nombreux. De toute façon la mairie sera pavoisée aux couleurs des deux pays. Si les communes jumelées ont des drapeaux de ville, ceux-ci seront positionnés soit dans la salle de signature, soit sur les hampes à l’extérieur de l’hôtel de ville, mais ils viendront toujours après les drapeaux des nations.

Quand programmer la cérémonie ?

N’oublions pas que c’est une fête citoyenne, qu’il faut donc choisir le meilleur moment pour tout le monde.  Souvent la signature a lieu en fin d’après-midi ou le samedi pour mobiliser le plus large public possible.

Rappelons-nous qu’un jumelage est le résultat d’un long travail préalable, de multiples discussions entre les deux villes. Je l’ai déjà dit, je crois, c’est un mariage. D’où le soin à apporter à la mise en scène. 

Les acteurs de la cérémonie doivent être conscients de leur responsabilité représentative. Certes un jumelage a toujours un côté populaire et bon enfant mais ce n’est pas pour autant un jour ordinaire. Le maitre de cérémonie joue un rôle décisif.

Une fois les officiels rassemblés sur une estrade pavoisée, (élus des deux communes et des autres collectivités, représentants des Etats), l’acte de jumelage est  lu, dans les deux langues avant la signature officielle. N’oublions pas que cet acte a une valeur juridique, c’est une sorte de contrat dont les clauses auront dû être approfondies, notamment en vue des dotations financières visées.

Ensuite vient la phase des discours. Les discours des maires interviennent après ceux des président(e)s des comités de jumelage. En général c’est le maire invité qui parle le premier. Les allocutions des deux maires sont les plus  importantes.

Pour les personnalités invitées à prendre la parole après les maires, l’ordre  protocolaire habituel est suivi : la personne la plus importante conclut le discours, le préfet s’il est présent.

La signature du pacte de jumelage

A la suite des allocutions, les deux maires, pourvus de leurs insignes (chez nous l’écharpe, le bleu en haut)  et assis à une même table, signent le pacte de jumelage et échangent leurs parapheurs.

Suivra la poignée de main des deux maires qui sera immortalisée par le photographe.

La tradition veut qu’on échange des cadeaux. Parmi les grands classiques : le stylo utilisé pour la signature, les clés de la ville ou des fanions. Une médaille de la ville pour les hautes personnalités étrangères présentes à la cérémonie. Rien n’interdit d’offrir des cadeaux plus personnalisés, liés par exemple à l’artisanat local. On veillera cependant à ne pas écraser son invité par un cadeau coûteux qui  l’obligerait à en faire autant lors de la cérémonie de retour. N’oubliez jamais que la notion de réciprocité est la base du jumelage.

Une question fait débat et vous trouverez des avis contradictoires à son sujet :   Doit-on Interpréter les hymnes nationaux ?

Aucune règle en la matière. Toutefois l’habitude s’est prise de jouer les deux hymnes nationaux.  On commence alors  par celui  du pays invité. Attention ! si  l’hymne européen est exécuté il ne peut pas suivre la Marseillaise.

 La cérémonie se clôturera par un cocktail qui pourra comprendre des spécialités de la ville jumelle, surtout si elle compte des compatriotes dans sa population. Ce moment doit être festif, convivial.

LE REPAS OFFICIEL

Pour le repas officiel toute la délégation de votre ville jumelle ainsi que le représentant diplomatique de son pays est invité avec les élus de votre commune particulièrement impliqués dans ce jumelage. On veillera à ce qu’un  représentant de chaque groupe politique du conseil municipal soit présent de même que les élus originaires du pays honoré.

Parmi les personnalités indispensables :

Le corps consulaire, les représentants du comité de jumelage, les cadres territoriaux de la coopération décentralisée, le préfet ou son représentant, les élus du  conseil régional, du conseil général, les représentants de la chambre de commerce et d’industrie (CCI), du rectorat, des universités, des grands corps et des forces vives et des médias.

Que vous soyez une maîtresse de maison ou un chef du protocole, le plan de table est l’exercice le plus délicat que vous ayez à maîtriser. En effet vous ne pouvez pas tricher avec la réalité et vos invités voient tout de suite à quel rang ils sont classés par rapport à la présidence de table.

J’en resterai à quelques conseils utiles.

Le représentant de l’Etat, en général le préfet dans son département, a toujours la prééminence sur les autres autorités, y compris militaires.

En l’absence d’un Ministre ou du Préfet, les Sous-préfets occupe le rang du représentant de l’Etat dans le département.

Vient après le représentant de l’Etat français l’ambassadeur du pays invité.

Les autres personnalités prennent place en fonction de l’ordre tel qu’il est fixé par la liste des préséances que j’ai déjà mentionné.

Il existe des situations quasiment inextricables. Le mieux est alors d’adopter une disposition de tables propre à gommer les difficultés. C’est pourquoi je préconise souvent l’emploi de tables rondes…

Permettez-moi de souligner un détail qui n’est pas insignifiant pour un jumelage : les interprètes déjeunent à table mais ne comptent pas dans l’ordonnance protocolaire.

Le maire prononce  des paroles d’accueil sur un ton convivial en évitant tout formalisme.

 Il a un mot pour les convives les plus importants, il les présente  à ses invités étrangers et passe ensuite la parole à son homologue. Rappelons qu’on interrompt le service pendant les allocutions. Le dernier mot est laissé au préfet s’il est présent, sinon à l’ambassadeur ou au consul de votre ville jumelle.

LES OUTILS DE COMMUNICATION ET DE SUIVI

La plupart du temps les ressortissants des villes jumelles ne parlent pas la même langue. Le premier effort doit donc porter sur l’interprétariat et la traduction. Il ne faut pas se contenter de traduire les discours des élus. A chaque rencontre avec des habitants, à chaque déjeuner il convient de faciliter la communication entre les personnes.

D’autres supports de communication sont indispensables, je vous recommande particulièrement :

Le livret protocolaire

Toujours très apprécié des officiels des deux parties, il indique dans le détail le déroulé des manifestations avec le nom exact des personnalités et des intervenants, ainsi que leurs coordonnées. L’expérience montre que chacun le garde précieusement.  

Le dossier de presse

Il rassemble pour les journalistes des informations utiles sur la ville jumelle et sur les motivations du jumelage. On mettra en valeur les perspectives ouvertes par cette initiative. Ne jamais oublier qu’un jumelage non compris par la population est totalement  contre-productif.

La conférence de presse

La conférence de presse clôt le voyage de la délégation étrangère et énonce les axes de coopération. La prise de parole s’effectue selon l’ordre suivant : le maire de la ville invitante, le représentant de la communauté de communes, le représentant du conseil général, le maire de la ville jumelle étrangère.

Prévoyez toujours une publication bilingue de ces discours.

Un album photographique immortalise en général les  phases de la cérémonie de signature. 

Un film du jumelage renforcera l’impact surtout s’il est vraiment conçu comme un film d’événementiel qui peut tourner en boucle. Les moyens techniques modernes rendent financièrement accessible ce type de support.

Le site de la ville  et les réseaux sociaux permettront de relayer l’information et d’en assurer le suivi dans le temps. Ils assurent ainsi une fonction de permanence inconnue et impossible hier.

EN BREF

Un jumelage est une date importante dans la vie d’une commune.

Le choix d’un partenaire est un engagement à long terme.

C’est pourquoi  il faut donner du temps au temps, multiplier les contacts préliminaires, approfondir les raisons justifiant le rapprochement.

Un jumelage s’inscrit dans le temps, et prépare l’avenir. D’où la nécessité d’y associer activement les jeunes, en particulier les scolaires.

Le respect  des règles protocolaires a pour but d’éviter les heurts de susceptibilité, d’associer chacun à l’œuvre collective. Toutefois au-delà de ces règles, ce qui compte, ce qui restera dans les mémoires, c’est l’authenticité, la sincérité qui aura présidé à l’ensemble des rencontres entre les personnes.

© Marie-France Lecherbonnier 

 

 

 

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2 septembre 2013 1 02 /09 /septembre /2013 18:57

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COMMENT  REUSSIR UN  DISCOURS ET PASSIONNER LE PUBLIC ?

Les élus ont constamment des discours à prononcer. Peu y sont à l’aise. Voici les bases de la leçon de rhétorique que je leur propose quand ils font  appel à moi comme cela a eu récemment lieu au Palais des Congrès (congrès de Cités Unies France, 2 juillet 2013). 

Comment séduire et convaincre un auditoire ?

L’art de la rhétorique s’enseignait encore au 19e siècle, il a brillé sous la Troisième République avec des hommes politiques dont la magie du verbe est restée légendaire : Jean Jaurès, Aristide Briand…Aujourd’hui la tradition reprend, encouragée par les campagnes présidentielles qui exigent de toucher le cœur et l’esprit d’immenses foules. On  voit et on entend certains de nos leaders contemporains renouer avec le lyrisme d’antan.

Pierre Mauroy, qui vient de nous quitter, faisait partie de ces orateurs populaires attachés à l’éloquence républicaine. Quels étaient ses secrets ? Le maire de Lille soignait tout particulièrement l’ouverture de son discours, veillait avec  le plus grand soin à utiliser le bon mot pour la bonne personne dans ses salutations. Son but était ensuite de capter son auditoire, fidèle ici à une antique règle de la rhétorique qui veut que l’on se mette à la place de son public quand on s’adresse à lui.  Comment captiver l’attention d’autrui, comment séduire ? Bien entendu les idées l’emportent, mais aucune idée n’atteint son but si elle n’est pas soutenue par le rythme, animée par le mouvement à la fois fait d’envolées, de poses  et de ruptures. En un mot un discours est émotion, émotion et émotion.

Cultiver sa voix et sa respiration  

 L’art de l’orateur est proche de celui du comédien. C’est une performance au sens propre, une performance où doivent s’exprimer l’individualité et la singularité de celui qui porte la parole. Un bon orateur sait utiliser sa voix, que  celle-ci soit douce ou rude, sourde ou claire. Il saura jouer de toute sa gamme, de l’aigu au grave. Il articulera bien tous les mots, distinguera bien les parties de sa phrase. Il adaptera son ton, son rythme, son élocution aux différentes phases de son discours : l’exorde demande une prononciation claire et apaisée ;  la narration, une tonalité simple et unie ; la démonstration exige de la chaleur, de la vivacité, de la force, voire de la passion. C’est à ce moment-là, celui où on argumente et on prouve,  que s’obtient l’adhésion. Attention toutefois à l’outrance qui détruit ce que la sincérité construit !

La respiration donne sa force à la voix et donne vie au discours. Les orateurs dotés d’un large coffre naturel ont un avantage inné. Les autres doivent apprendre à adapter leur organe à la fonction : éviter les longues périodes qui essoufflent, équilibrer la rapidité et la lenteur. Aristide Briand dont je parlais en introduction, dépourvu de toute puissance phonatoire, a conquis les publics les plus exigeants par la seule virtuosité de ses modulations.

Joindre le geste à la parole 

L’orateur ne fait pas que parler. Il se montre, il s’expose. D’où l’importance cruciale de sa gestuelle. D’abord, il y a la posture du corps, l’affirmation de sa présence. Parfois l’élégance prime, parfois l’autorité, toujours la cohérence entre le propos et l’attitude. Ce qu’on appelle la posture. Il ne faut pas qu’il y ait contradiction entre la teneur des propos et le physique de l’orateur. Le plus visible est le port de tête, le visage. Dans le visage, les yeux. Ce sont eux qui expriment la conviction, la joie, l’amitié, l’enthousiasme, le regret, la tristesse. Leur langage touche le cœur et imprime profondément la mémoire. Autrefois la scène utilisait des masques : ce qui montre que la civilisation a compris depuis bien longtemps que l’émotion se lit sur le visage, le vrai miroir de l’âme.

Des Grecs à la synergologie contemporaine, on a tout dit de l’éclat des yeux, de la position des paupières, des mouvements des lèvres, du jeu des épaules, des bras et des mains. Le langage du corps a été scruté de tout temps : comment bouger ? quand ne pas bouger ? quand mouvoir un bras plutôt que les deux ? quand faut-il écarter les doigts, tendre la main vers l’auditoire, élever ou arrondir ses gestes, avancer ses pas, s’appuyer sur ses jambes ?

Bien entendu, le vêtement a aussi sa place. C’est moins la convenance qui fait autorité en la matière que la conformité du paraître à l’être. Le désordre, la négligence ne sont pas reprochés à un orateur qu’habite un feu intérieur, le feu de la conviction contagieuse.

Tout cela s’apprend-il ? Le vieux maître de la rhétorique, Quintilien, se mettait en colère quand on lui parlait de règles. « Qu’y-a-t-il  de plus pitoyable que de s’attacher servilement aux règles ? » s’écriait-il ! Et il ajoutait : « Quel orateur a jamais parlé le  langage de la dialectique ? ». Le media training contemporain lui semblerait une monstrueuse hérésie. Ne parlons pas de ces fameux « éléments de langage » qui n’ont abouti qu’à forger la langue de bois contemporaine. Plus terribles encore : les modèles de discours aseptisés en vente sur Internet.

Ces réserves faites, il existe de grands principes à connaître, qui sont bien utiles pour construire un discours plaisant, touchant et efficace.

Comment commencer son discours et subjuguer le public ?

       Sur quel ton, sur quels arguments commencer son discours ? On a vu que Pierre Mauroy apporte le plus grand soin à ce qu’on appelle l’exorde. C’et le moment de la séduction, il est indispensable de donner une bonne impression, de déclencher la sympathie.

Donc on n’hésitera pas à se montrer aimable, à faire un éloge discret mais senti des personnalités présentes. Elles seront félicitées pour leur dévouement sans faille, pour leur soutien indéfectible. Les plus proches de l’orateur seront traités d’amis, d’alliés, voire de frères. Même les adversaires seront salués avec dignité. On ne retiendra que les éléments positifs dans cette introduction rhétorique. L’enthousiasme de l’orateur ne doit pas pour autant l’emporter immédiatement vers des sommets de lyrisme. Cela viendra plus tard. Pour l’instant il faut modérer l’élan du propos, mesurer l’usage des figures, surtout ne pas être trop long, éviter toute digression.

Cette introduction avenante mise en place, vient la phase de la narration. Il s’agit de rappeler les faits, de rappeler les dates qui ont conduit au présent événement : vœux, commémoration, campagne...On sèmera à profit  le récit d’anecdotes rafraîchissantes, de portraits sympathiques. Dans cette partie, pas d’argumentation. Clair, simple, vraisemblable, le récit ne tend qu’à souligner l’évidence des choses. On ne se perdra pas dans le détail. Deux ou trois souvenirs qui font sourire l’assistance valent mieux que toute longue et oiseuse démonstration. Dans cette partie, dite avec naturel et enjouement, on aura pu glisser quelques figures discrètes, mais sans excès.

Comment argumenter et déchaîner les passions ?

Une fois les faits rappelés, le discours va prendre son envol sur les ailes de la passion. L’orateur désormais s’engage, en tant que premier acteur de la pièce qui se joue et dont il est le principal protagoniste. S’engager veut dire qu’il va s’efforcer de démontrer, d’argumenter, de confirmer ses choix, de réfuter les oppositions. A ce stade il entre dans l’arène de la rhétorique. Les choix opérés jusqu’alors, la mesure, le naturel, vont céder aux puissances de la conviction. Le tribun s’installe à la tribune. Il fera feu de tout bois, images, figures, effets de manche.

Pour asseoir sa démonstration, l’orateur fait le bilan des valeurs qui ont motivé sa vie publique : la raison, le courage, la sagesse, l’esprit de découverte. En célébrant ces valeurs, il dresse un portrait flatteur de lui-même : il est  un homme sage, courageux, prévoyant, raisonnable, ouvert…Toutes ces vertus seront néanmoins placées par lui au crédit non d’un seul homme, mais à celui de ses administrés, de sa ville, de son département, de sa région, de sa famille politique…L’heure est au partage et au consensus.

Le public est au spectacle et s’attend à une belle prestation d’acteur. Les figures d’amplification prospèreront sans entrave, le ton et la gestuelle se libèrent. Quelques belles phrases, parfois des slogans, feront la Une des journaux du lendemain et s’imprimeront dans les mémoires. Attention toutefois à ne pas manipuler les faits ! Le public n’aime pas qu’on triche avec les mots car qui triche avec les mots est immédiatement suspecté de tricher avec les faits. L’orateur a donc intérêt à s’appuyer sur les préférences générales de ses auditeurs pour être cru et compris.

Les thèmes les plus efficaces sont bien connus : nous conduisons notre  action dans l’état d’esprit légué par les anciens et dans le respect des valeurs républicaines, nous savons  tirer habilement parti des circonstances favorables et protéger nos concitoyens des effets de la crise , nous savons  anticiper courageusement  toute une série d’événements pourtant difficiles à  prévoir, nous avons réussi et nous continuerons de réussir grâce à l’aide de personnes dévouées, méritantes et désintéressées, nous vouons corps et âme au développement économique et culturel de notre commune, de notre pays, nous  œuvrons pour les générations futures…

On évoquera sans complexe les débats ayant fait polémique. Bien entendu on ne le fera que si la question a été portée sur la place publique. Sur le plan rhétorique la réfutation des arguments inverses fait partie de la démonstration. Réfuter, c’est confirmer le bien-fondé de son argumentation.

 On ira, s’il le faut, jusqu’ à remercier ses contradicteurs d’avoir opposé des arguments et des interrogations qui ont obligé à un approfondissement du débat.

Comment conclure en apothéose ?     

La péroraison est le délice de l’orateur. Le moment où il prend son plaisir. C’est le couronnement de son discours, la péroraison a pour but d’emporter la conviction de l’auditoire dans un feu d’artifice final.

On reprend les idées fortes du discours et on leur donne un aspect frappant en condensant les mots, en les ranimant par des figures audacieuses. On joue avec les figures de pensée : on se demande si on n’a rien oublié, on fait semblant de ne pas être d’accord avec soi-même, bref on joue au chat et à la souris avec un public conquis et complice. Humour de pure forme, car en même temps, on donnera du pathétique, de la hauteur au propos. Les ruptures de rythme ne sont pas rares dans une péroraison réussie. Ne vous laissez toutefois pas dépasser par l’emphase ou la boursouflure.  Le public sera sensible aux qualités littéraires, artistiques, de la péroraison. Il ne vous pardonnera pas des stratagèmes de bateleur de foire.

Vous voulez vous jeter à l’eau ? En quelques heures je suis capable de vous convaincre des effets positifs de ma méthode ! 

 

© Marie-France Lecherbonnier

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27 août 2013 2 27 /08 /août /2013 08:20

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CONNAITRE LE VIN  ET SAVOIR EN PARLER

Le tourisme œnologique a connu en 2013 un succès de plus en plus remarquable. Les amateurs de vin se rendent sur les lieux de production pour approcher au plus près les secrets de nos viticulteurs.

Qui a créé le vignoble français ?

La vigne est l’œuvre des moines médiévaux. On croit souvent les religions hostiles au vin. Certes il en est qui interdisent la consommation de tout alcool. Mais telle n’est pas la leçon des saintes Ecritures où l’on relève 1200 allusions au vin. Une cinquantaine seulement mettent en garde contre l’ébriété.

La transmutation de l’eau en vin par Jésus lors des noces de Cana achève de persuader les Chrétiens de son excellence. Nos moines médiévaux ont été les premiers à retenir la leçon au point que les réticences de saint Benoît ont dû céder aux pressions des abbés. La ration quotidienne est fixée à une «hémine », environ un demi-litre. La pénitence consistant à se priver de vin est très mal vécue dans les monastères où l’on n’est pas loin de se rebeller contre les autorités si elles n’approvisionnent pas les tables selon les rations promises. De nombreux débats ont lieu pour déterminer quelle quantité de vin ne pas dépasser.

Les fidèles, connaissant le penchant des moines pour la boisson, n’hésitaient pas à en faire cadeau aux religieux qui, en contrepartie, leur pardonnaient volontiers leurs péchés. Il est vrai que les Européens, au Moyen Age, étaient également de francs buveurs avec, selon les pays, une moyenne de 150 à 270 litres par an et par personne. Toutefois, dans ces époques lointaines, et cela durera jusqu’au 18ème siècle, le vin ne se boit pas pur. On le coupe  -mais sans excès ! - d’eau. La proportion d’eau habituelle est de 20%.

On ne s’étonnera pas que dans ces conditions les moines, afin de ne pas manquer, s’intéressèrent vite à la vigne. Un prétexte parfait leur était donné par la nécessité d’avoir du vin pour célébrer la messe.

Même dans des régions peu propices à la culture de la vigne comme l’Ecosse, le Brandebourg ou la Picardie, sont plantées des vignes. On y récolte souvent une affreuse piquette mais peu importe aux gosiers altérés. De plus l’économie des monastères connaît une embellie grâce à ces cultures locales. En effet le transport renchérissait par six les vins en provenance de Grèce ou d’Italie.

Dans les régions qui s’y prêtent bien, les moines vont rapidement atteindre une qualité exceptionnelle grâce à leurs soins et à leur obstination. Les crus façonnés par eux comptent par dizaines. Vingt-huit dans la seule Bourgogne : le Clos de Bèze (œuvre des Bénédictins), le Chassagne-Montrachet (Chevaliers de Malte), le Meursault (Cisterciens)…Dix vins de Loire, dont le Muscadet et le Bourgueil ; dix vins du Rhône (dont le Château neuf, l’Hermitage) ; sept du sud-ouest (dont le Cahors) ; quarante vins du Bordelais, dont la quasi totalité des grands. A quoi il faut ajouter les Corbières, le Minervois…

Le phénomène excède les frontières de la France. Les Bénédictins ont créé le Freisa en Italie, l’Egri Bikaver en Hongrie, le Fendant en Suisse, le Wilberton en Angleterre. Les Cisterciens : le Rioja en Espagne, le Gattinara en Italie, le Heiligenkreuz en Autriche ; les Chartreux et les Chevaliers de Rhodes ont également enrichi la gamme des vins italiens.

Le seul défaut de tous ces vins était d’être trop bons. Les moines les vendaient souvent à contrecœur même si les profits réalisés aidaient la communauté à mieux vivre. On reprochera longtemps aux viticulteurs en robe de bure leur habitude de garder le meilleur pour eux-mêmes…

Quelles sont les conditions pour obtenir un bon vin ?

La carte du vignoble français a été façonnée à cette époque lointaine. Elle compte aujourd’hui 14 régions. En suivant le sens des aiguilles d’une montre, on relève : la Champagne, l’Alsace, le Chablis, le Jura, la Bourgogne, la Savoie, Die, la Provence , la Côte du Rhône, Le Languedoc-Roussillon, le Sud-Ouest, le  Bordeaux, le Centre, le Val de Loire.

Le raisin de cuve, Vitis Vinfera, destiné à la vinification, ne compte pas moins de 5000 cépages. Pour obtenir un vin de qualité il convient de sélectionner le cépage le mieux adapté au terroir. Par exemple on choisit un cépage précoce dans le cas d’un climat rigoureux, un cépage tardif pour une saison chaude, le but étant de  toujours vendanger en septembre.

Le facteur déterminant, indispensable : la qualité du raisin. Viennent ensuite :

L’ensoleillement, la meilleure situation étant celle d’un coteau abrupt situé à un angle de 90 ° ;

Le sol, dont les couches sont pénétrées très profondément par les racines (elles descendent parfois d’un mètre par an) : c’est le sol qui  donne son caractère au vin. Sol argileux : vigueur. Sol calcaire : rondeur. Sol silicieux : légèreté.

La taille qui dirige la concentration du grain.

La vigne a une longue durée de vie. Sa productivité maximale est atteinte entre 12 et 25 ans. Le vieillissement de la vigne  augmente la qualité du raisin.

Du mois de mars à l’automne, la vigne suit un cycle végétatif dont les grandes phases sont : le débourrement avec l’éclosion des bourgeons (mars-mai) ; la  floraison (mai-juin) ; la véraison, la coloration des baies et la montée des acides (juin-août) ; la maturation, la montée des  sucres au détriment des acides (août-septembre) ; les vendanges (septembre-novembre). 

Une fois récolté, le raisin va subir de nombreuses opérations dont l’essentielle est la fermentation alcoolique qui consiste à transformer les sucres en alcool sous l’action des levures.

Comment parler du vin ?

L’amateur de vin doit avoir acquis, pour apprécier et faire apprécier un bon vin,  une bonne méthode d’analyse sensorielle. En voici les trois phases :

Impression à l’œil : déterminer la couleur (blanc, rosé, rouge) et la caractériser (pâle, clair, or, topaze, cuivré, grenat, vermillon, orangé…)

       déterminer l’aspect : limpide, brillant, voilé…


Sensation au nez :  déterminer l’intensité (ferme, puissante, faible…)

 déterminer la qualité (élégante, racée, ordinaire…)

 déterminer le caractère (fruité, végétal, grillé…)


Sensation en bouche : sucre  (brut, sec, doux, moëlleux…)

 acide (vert, mordant, acidulé, souple…)

 corps (léger, capiteux, généreux…)

 chair (dépouillé, maigre, rond, gras…)

 tannin (faible, équilibré, astringent…)

 arôme (minéral, boisé, fuité…)

 persistance (courte, intense, longue…)

 arrière-goût (franc, déplaisant, instable…)

Ce ne sont là que quelques bribes d’un vaste lexique imagé et poétique dont les grands œnologues jouent avec une stupéfiante maîtrise.            

 

 

© Marie-France Lecherbonnier

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7 août 2013 3 07 /08 /août /2013 16:36

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LE 15 AOÛT, FETE DE L’ASSOMPTION.

Au cœur de l’été, voici une fête immémoriale, un jour férié que nul ne saurait remettre en cause même si sa justification manque singulièrement de faits probants. Mais faut-il que la raison se mêle de tout ?

 Le 15 août, culmine la période des moissons. De même que les autres grandes fêtes du cycle liturgique, comme Noël ou Pâques, cette date célèbre une phase  essentielle de la Nature, en l’occurrence le résultat du travail effectué par l’homme dans les champs.

La religion s’empara de la fête profane  dès le 6ème siècle. S’imposa son nom chrétien, l’Assomption, à partir d’une croyance selon laquelle Marie, à la fois Vierge et Mère de Jésus, a été « élevée au ciel », sa dépouille ayant, prétend la légende, disparu de sa tombe pour être portée au ciel. Bien qu’aucune source scripturaire sérieuse ne fonde cette légende, l’Eglise en fit un dogme du fait de son éloquente signification symbolique. N’était-ce pas une belle image, une belle métaphore de l’élévation de la Foi vers Dieu ?

Dès le Moyen Age, l’Assomption fut la fête la plus célébrée en France et partout furent édifiées des églises, des cathédrales en l’honneur de Notre Dame. Des dizaines de milliers de filles reçurent chaque année le prénom de Marie. Et que de Mary, de Maria, de Mariska, de Myriam dans le monde…

Le coup de génie politique qui transforma la  fête religieuse de l’Assomption en fait historique, est signé Louis XIII. En effet, non seulement il consacra à Notre Dame  son royaume mais il demanda, en 1637, à tous ses sujets d’effectuer tous les 15 août une procession  dans chaque paroisse afin qu’un fils lui soit donné par le Ciel ! La naissance, un an plus tard, du futur Louis XIV  renforça  encore le culte marial en France.

La représentation de Marie aspirée  par l’azur vient d’une vision de saint jean en son Apocalypse : une femme lui serait apparue dans le ciel, revêtue de soleil, ayant la lune sous les pieds, et sur sa tête une couronne faite de douze étoiles.  Les innombrables processions du 15 août, resplendissantes de bleu et de blanc,  garderont cette image d’une Vierge céleste soutenue par des anges.

L’époque moderne n’a pas échappé à l’attrait de Marie. En 1854 est proclamé le dogme de l’Immaculée conception qui, en quelque sorte, explique et justifie « l’assomption ».N’ayant pas subi de souillure charnelle, la mère de Dieu, aurait à l’instar de  son fils accédé directement au paradis.

Le pape Pie XII institutionnalise en ces termes la fête mariale en 1950 

« En l'autorité de notre Seigneur Jésus-Christ, des bienheureux Apôtres Pierre et

Paul, et par notre propre autorité, nous prononçons, déclarons, et définissons comme un dogme divinement révélé que l'Immaculée Mère de Dieu, la Vierge Marie, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire céleste »

Le dogme est précisé en 1964 par le concile Vatican II :

 « Enfin, la Vierge Immaculée, préservée de toute tache de la faute originelle, au terme de sa vie terrestre, fut élevée à la gloire du ciel en son âme et en son corps et elle fut exaltée par le Seigneur comme Reine de l'univers afin de ressembler plus parfaitement à son Fils, Seigneur des seigneurs et vainqueur du péché et de la mort. »

L’histoire de Marie n’a pas dit son dernier mot. Croyance profane à l’origine, dogme chrétien, puis fait politique, le culte marial a pris un nouvel essor avec l’Union européenne dont la bannière bleue aux douze étoiles aurait été inspirée par l’iconographie de la Vierge.   

© Marie-France Lecherbonnier

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17 juillet 2013 3 17 /07 /juillet /2013 09:16

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mflecherbonnier@hotmail.fr

LE ROI DES BELGES : SON SERMENT, SA MISSION, SES RESIDENCES, SON ENTOURAGE.

L’abdication d’Albert II et l’accession de son fils Philippe au trône de Belgique : une belle opportunité pour rappeler les principes fondateurs de ce modèle en matière de « monarchie citoyenne ».

En quels termes le nouveau souverain prête-t-il serment ?

Le 9 août 1993, le  roi Albert II a prêté serment dans les trois langues de la Belgique (français, flamand, allemand). Le texte français est le suivant :

« Je jure d’observer la Constitution et les lois du peuple belge, de maintenir l’indépendance nationale et l’intégrité du territoire. »

Soulignons que le roi des Belges ne détient son mandat que de la volonté des Belges. Par conséquent, bien qu’héréditaire, l’accession au trône n’est pas automatique : d’où la puissante portée symbolique du serment par lequel le souverain s’engage devant ses compatriotes  -en aucun cas ses sujets- à respecter les principes fondateurs du royaume.     

Que signifient les trois couleurs de la bannière nationale ?  

Les trois couleurs (noir, jaune, rouge) ont été fixées dès le Congrès national de 1830, berceau de la Belgique contemporaine. Elles figuraient déjà dans les bannières du Brabant, du Hainaut, de Flandre et de Namur. L’ordre constitutionnel des couleurs est rouge, jaune, noir. L’héraldique associe le rouge au sacrifice, le jaune à la maturité et à la prospérité, le noir à la force.

Le premier drapeau belge présentait les couleurs à l’horizontale. Elles ont été par la suite placées à la verticale pour, semble-t-il, rappeler l’attachement du pays au progrès. On considère en général que le placement horizontal des couleurs caractérise les régimes conservateurs.

Les couleurs ne sont hissées sur le palais royal que lorsque le roi y séjourne.

Les bâtiments publics pavoisent aux dates officielles : 1er mai (fête du travail), 5 mai (journée du Conseil de l’Europe), 8 mai (jour de la Victoire), 9 mai (fête de l’Europe), 21,22,23  juillet (Fête nationale), 11 novembre (Armistice) ainsi que pour l’anniversaire et la fête du Roi et pour célébrer la date anniversaire du mariage royal.

Quel est le sens de la devise « L’Union fait le Force » ?    

« En adoptant la devise « L’Union fait la Force. », les fondateurs de la Belgique indépendante avaient conscience à la fois de notre diversité et de notre indispensable cohésion. Ils pensaient qu’au sein d’un pays, les régions dans leur légitime autonomie sont les parties complémentaires d’un tout et ne peuvent s’ériger en jalouses rivales. Ils savaient que fédérer, c’est unir dans la différence acceptée et non pas dissocier dans l’affrontement…C’est une des missions essentielles de la monarchie que de le rappeler sans relâche. » Baudouin, à l’occasion du 25e anniversaire de sa prestation de serment, le 31 mars 1976.

Quelles sont les résidences royales ?

Le roi travaille au palais, place des Palais, à Bruxelles. C’est en ce lieu qu’il exerce sa fonction officielle. Ce palais appartient à l’Etat qui le met à la disposition du roi et des membres de sa famille : ceux-ci y jouissent d’un bureau. Une partie de l’édifice est ouverte aux visites du public.

Les réceptions ont lieu au château de Laeken qui a abrité depuis 1831 tous les monarques belges. Plusieurs l’ont enrichi d’apports originaux dont les superbes serres de Léopold II. Laeken appartient aussi à l’Etat. 

Comment est composée la Maison du Roi ?

Une centaine de personnes constitue « l’entourage » du Roi et de la famille royale, dont trente «dignitaires » qui en assurent l’encadrement.

La « Maison du Roi » s’est constituée de façon coutumière et est organisée selon la seule bonne volonté du souverain en exercice. Néanmoins il est d’usage de ne pas heurter le gouvernement par des nominations hors  de propos et de respecter, dans sa composition, un équilibre linguistique et politique. Ce qui n’exclut pas la présence de fortes personnalités, souvent issues de la haute fonction publique,  auprès du roi.

Quatre départements structurent la Maison du Roi : le département du grand maréchal de la Cour ; le cabinet du Roi ; la Maison militaire ; le service de la Liste civile.

Le grand maréchal de la Cour a préséance sur les autres chefs de service. Il est en charge des activités publiques du Roi et règle l’agenda de la Reine. Le chef du  Protocole et le secrétaire particulier du Roi appartiennent à son service.

Le chef du cabinet du Roi assure la liaison avec le gouvernement et l’ensemble du monde politique. Les questions administratives et les relations internationales sont également de son ressort. Il en est de même des recours en grâce, des distinctions nobiliaires et honorifiques et du service de presse.

Le chef de la Maison militaire, un gradé de haut rang, veille aux questions de défense nationale. Sa présence aux côtés du Roi rappelle que le souverain est le garant de l’intégrité nationale et assume, de façon au moins officielle, la fonction de commandant en chef.  La Maison militaire a la haute main sur les aides de camp du roi, les officiers d’ordonnance et la garde de palais. D’autres spécialités lui incombent : le système informatique du Palais… et les relations avec les sportifs.

L’intendant de la Liste civile gère les moyens financiers  mis à la disposition du souverain par l’Etat. Il est responsable de l’entretien du palais de Bruxelles et du château de Laeken et assure les achats de même que les dépenses salariales et logistiques. 

 

© Marie-France Lecherbonnier

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  • Marie-France Lecherbonnier est  auteure, designer et conférencière. Elle anime des séminaires et formations continues en matière de Protocole et Savoir-Vivre en Europe, Asie et Afrique
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